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Παρασκευή, 15 Νοεμβρίου, 2024

Η ΟΜΙΛΙΑ ΤΟΥ ΟΙΚΟΥΜΕΝΙΚΟΥ ΠΑΤΡΙΑΡΧΟΥ ΣΤΟ ΜΑΡΟΚΟ (ΦΩΤΟ ΚΑΙ ΒΙΝΤΕΟ)

Ο Οικουμενικός Πατριάρχης Βαρθολομαίος ομίλησε σήμερα, Παρασκευή 3 Νοεμβρίου 2017 – ως μόνος εκπρόσωπος του θρησκευτικού κόσμου – στην 10η World Policy Conference, που συγκαλείται στο Μαρακές του Μαρόκο (3-5.11.2017). 
Τους συνέδρους της Διάσκεψης καλωσόρισε ο Thierry de Montbrial, Πρόεδρος του Ιδρύματος IFRI (Institut Franҫais de Relations Internationales), και ο Οικουμενικός Πατριάρχης άνοιξε την Διάσκεψη με την ομιλία Του στα γαλλικά, την οποία και παραθέτουμε στη συνέχεια, όπως και το σχετικό βίντεο της έναρξης της Διάσκεψης. Η Πατριαρχική ομιλία στο 35’12” και εξής.
Μεταξύ άλλων ο Πατριάρχης είπε: 
«Δυστυχώς η θρησκεία μετετράπη καθ΄όλη την διάρκεια του εικοστού αιώνα σε όργανο επιβολής εξουσίας, καταφέρνοντας να εκτρέψει ακόμα και αυτή τη φύση του θρησκευτικού λειτουργήματος: το να είναι δηλαδή παράγοντας ειρήνης, συμφιλιώσεως και διαλόγου. Για να καταλάβουμε αυτό που συμβαίνει σήμερα στον κόσμο, πρέπει να αναλογιστούμε τον ρόλο της θρησκείας μέσα στην ανθρωπότητα. Αυτό που κάποιοι ονομάζουν “επιστροφή στην θρησκεία” ή “επιστροφή στον Θεό” μέσα σε μια κοινωνία “μετά-κοσμική” δεν είναι παρά η ενεργοποίηση μιας ουσιαστικής διάστασης της ανθρωπότητας που, αν και είναι πολύ στενά συνδεδεμένη με την ταυτότητα, δεν αποτελεί τόσο σημείο ταύτισης, όσο σημείο διάστασης μεταφυσικής και πνευματικής. Εξάλλου, η Αγία και Μεγάλη Σύνοδος της Ορθόδοξης Εκκλησίας, που έγινε τον Ιούνιο του 2016, μας υπενθύμισε τη σημασία του διαθρησκειακού διαλόγου: Ο ειλικρινής διαθρησκειακός διάλογος συμβάλλει στην ανάπτυξη αμοιβαίας εμπιστοσύνης, στην προώθηση της ειρήνης και της καταλλαγής. Η Εκκλησία αγωνίζεται για να καταστήσει αισθητή την “άνωθεν ειρήνην” επί της γης. Η αληθινή ειρήνη δεν επιτυγχάνεται με την δύναμιν των όπλων, αλλά μόνον δια μέσου της αγάπης, ήτις “ου ζητεί τα εαυτής”. Ανάμεσα στους μεγάλους θρησκευτικούς θεσμούς, το Οικουμενικό Πατριαρχείο Κωνσταντινουπόλεως κατέχει, εκ της ιστορίας του, μία θέση ιδιαίτερη. Παρά το γεγονός ότι κατά τη διάρκεια δύο χιλιετιών αντιμετώπισε βαθιές ανατροπές και ρήξεις, οι οποίες υπήρξαν συχνά τραυματικές, το Πατριαρχείο μας παρέμεινε πάντοτε ενεργό, απόδειξη του ότι μπορεί να επιζήσει και να αποτελέσει φορέα πολιτισμού στο πέρασμα των αιώνων. Από την ύπαρξή της και μόνον, η Ορθόδοξη Εκκλησία συμβάλλει στο να δώσει νόημα και ελπίδα σε ένα κόσμο που αγωνιά, που αναζητεί σήμερα τον δρόμο του».

World Policy Conference, Sa Toute-Sainteté, 
le Patriarche œcuménique Bartholomée, 
 Marrakech (Maroc), 3-5 novembre 2017 
Mesdames et Messieurs, 
Chers amis, 
Permettez-nous d’introduire notre propos par une citation : « Le monde où nous vivons aujourd’hui a besoin des valeurs de la religion, qui recèlent les vertus dont nous devons nous armer pour être dans les bonnes grâces de Notre Créateur, Dieu Tout-Puissant, et qui renforcent en nous la propension à la tolérance, à l’amour et à la coopération marquée du sceau de la charité et de la piété humaines.» 
Ces mots, nous les devons à Sa Majesté, le Roi Mohammed VI, Amir Al-Mouminine, dont le monde connaît l’ouverture, la sagesse et le désir de bâtir des ponts d’un côté à l’autre de la Méditerranée, tout en combattant avec courage et détermination le fondamentalisme religieux. Ce dernier ne se nourrit pas que d’un désenchantement du monde, que de la faillite de la « modernité heureuse », que d’une opposition à la mondialisation. Le fait religieux s’est transformé tout au long du 20e siècle et sa manipulation, pour ne pas dire son instrumentalisation à des fins hégémoniques, a détourné la nature même de sa vocation : être un acteur de paix, de réconciliation et de dialogue. 
La scène internationale connaît aujourd’hui de profonds bouleversements. Les conflits identitaires se lient à la montée en puissance des injustices sociales. Parallèlement, la perception des inégalités va croissante. Dans ce contexte d’insécurité, la religion peut avoir un rôle positif, si tant est qu’elle devienne capable de se réapproprier la nature de son propre message. Un message détourné. Un message violé. Un message piégé par le bellicisme des fondamentalismes. Bien qu’il soit vrai que de nombreux malentendus sur le fondamentalisme religieux circulent, la religion a sans aucun doute été utilisée comme un moyen à des fins politiques ou à des intérêts personnels qui lui sont par essence contradictoires. 
Aussi, faut-il bien remarquer la nécessité impérieuse du dialogue pour répondre aux conflits contemporains, au-delà de la nature religieuse ou non de ces conflits. Le dialogue n’est pas une négociation. Ce n’est pas non plus une controverse. Il s’agit d’une caractéristique de l’être par laquelle se constitue la qualité relationnelle de la personne humaine. Pour comprendre ce qui se passe dans notre monde aujourd’hui, il nous faut réfléchir au rôle de la religion dans l’humanité. Ce que d’aucuns appellent le «retour du religieux » dans un monde « post-séculier » n’est en fait que la réactivation d’une dimension essentielle de l’humanité qui, même si elle est puissamment liée à l’identité, n’en est pas pour autant identitaire, mais métaphysique et spirituelle. 
En ce sens, les fonctions du religieux peuvent nous paraître évidentes, elles n’en sont pas moins cruciales pour l’existence et la co-existence humaines: a. La religion est liée aux préoccupations de l’être humain et nous aide à élaborer des réponses aux questions existentielles en rapport avec la vie et son sens, la vérité et l’éternité. b. La religion est liée à l’identité des peuples et des civilisations. C’est la raison pour laquelle les traditions religieuses d’autrui doivent non seulement être connues, reconnues, mais aussi appréciées. Cette connaissance est une condition préalable indispensable à tout dialogue. c. La religion a participé à la réalisation des grandes aventures culturelles et civilisationnelles de l’humanité. d. Enfin, la religion est un facteur essentiel du processus de paix. Ainsi que l’écrivait saint Paul : «Car Dieu n’est pas un Dieu de désordre, mais un Dieu de paix. » (1 Co 14, 33) 
C’est d’ailleurs ce que le Saint et Grand Concile de l’Église orthodoxe, en juin 2016, a rappelé s’agissant de l’importance du dialogue interreligieux : «Le dialogue interreligieux franc contribue au développement d’une confiance mutuelle dans la promotion de la paix et de la réconciliation. L’Église lutte pour rendre plus tangible sur terre la ‘paix d’en-haut’. La véritable paix n’est pas obtenue par la force des armes, mais uniquement par l’amour qui ‘ne cherche pas son intérêt’ (I Co 13, 5). Le baume de la foi doit servir à panser et à guérir les plaies anciennes d’autrui et non pas à raviver de nouveaux foyers de haine.» (par.17)

Mesdames et Messieurs, 
Chers amis, 
Le Maroc a été un pays précurseur en matière de dialogue interreligieux, à l’avant-garde de la lutte contre le fondamentalisme. Comme vous le savez, le bassin méditerranéen a connu pendant les siècles passés une cohabitation pacifique entre juifs, chrétiens et musulman. Cette expérience démontre bien, s’il le fallait encore, que les croyants de traditions religieuses différentes peuvent vivre ensemble autour d’un projet commun : celui de l’unité de l’humanité et de la paix. 
Parmi les grandes institutions religieuses, le Patriarcat œcuménique de Constantinople occupe, par son histoire, une place unique. Au fil des profonds bouleversements souvent traumatisants qu’il a dû affronter en deux millénaires, notre Patriarcat a toujours su rester actif, preuve s’il en est qu’il est possible de survivre et de transmettre un témoignage de civilisation à travers les âges. Par sa seule existence, l’Église orthodoxe contribue à donner du sens et de l’espoir à un monde angoissé, qui cherche aujourd’hui son chemin. 
La légitimité des religions aujourd’hui dépend de leur attitude claire à l’égard de la protection de la liberté et de la dignité humaines comme des principes fondateurs dans l’établissement de la paix. Aucun défi, soit-il personnel ou international, ne trouvera de solution dans la solitude et l’isolement. Nous avons besoin les uns des autres, car nous sommes des êtres de relation, des êtres de communion qui, à mesure que nous nous rapprochons, devenons de véritables acteurs de paix.

Nous ne pouvons que nous réjouir de la tenue, dans ce pays, de cette nouvelle édition du World Policy Conference. En nous invitant à exprimer ces quelques pensées lors de la séance d’ouverture, ses organisateurs – et nous souhaitons ici remercier de tout cœur le professeur Thierry de Montbrial de son amitié – ont souligné l’importance fondamentale que prend la religion dans la réflexion sur les affaires du monde, ou, pour parler autrement, sur les enjeux internationaux. Le Patriarcat œcuménique que nous avons l’honneur de représenter les en remercie, tout en leur souhaitant un plein succès dans leur entreprise.

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